Voici le texte de ma chronique du 29 avril
François-Xavier Bellamy, le candidat des Républicains aux élections européennes, fait figure de petit miracle pour la droite. Alors que le parti plafonne bas dans les sondages (Laurent Wauquiez réaliserait, selon une enquête Ifop de février, un score de 8 % à l’élection présidentielle), le jeune élu de Versailles et sa liste arriveraient en 3e position au scrutin du 26 mai prochain. Les derniers sondages lui donnent l’espoir de remporter 14 % (OpinionWay, 25 avril) ou 15 % des voix (Ifop, 26 avril), derrière le parti présidentiel (21 % à 23 %) et le Rassemblement national (21,5 % à 24 %).
Le résultat est en deçà des dernières performances européennes de la droite : en 2014, l’UMP avait remporté 20,8 % des voix (le FN, 24,9 %) ; en 2009, 27,9% (le FN, 6,3 %). Mais compte tenu du désastre de 2017, le score promis à François-Xavier Bellamy constitue une petite victoire.
Comment expliquer ce relatif succès ?
Une première raison est médiatique. Le candidat est jeune, dynamique et nouveau dans le paysage et il paraît sympathique. Le projet de son parti se distingue cependant du message agréable et de l’image aimable qu’il renvoie : commençant par des mesures « contre l’immigration illégale », il enchaîne sur l’« Europe frontière ». Les mesures ne sont pas toujours aussi radicales que le vocabulaire employé veut faire paraître, mais celui-ci fait clairement appel aux registres de la protection et de la fermeture : « contrôle », « défendre », « refuser », « interdire », « arrêter » reviennent régulièrement. Le mot « économie », lui, n’apparaît que trois fois (dont deux avec « circulaire » et « bio »).
La campagne de 2019 est ainsi à l’image de celle de 2017 : le programme importe moins que la confiance qu’inspirent les candidats ou que le sentiment d’identification que les électeurs projettent sur eux. Le succès de LREM dans la campagne actuelle en est la preuve : le parti présidentiel n’a même pas de programme !
Une seconde raison est plus structurelle. Elle marque le succès d’une droite d’inspiration conservatrice et – en reflet – l’échec de sa sœur libérale.
Cela fait des années que cette droite, qui fait primer l’identité et la stabilité sur l’économie et le mouvement, travaille durement à la maturation d’une expression politique fondée sur une réflexion intellectuelle solide et la mobilisation d’un électorat militant, uni par le sentiment d’une forme de communauté.
La plus grande force de François-Xavier Bellamy est la robustesse de sa structuration intellectuelle : ses raisonnements sont mûris et charpentés et, à l’entendre, il semble s’en tenir à une ligne cohérente (qu’on la partage ou non), là où ses camarades de partis et adversaires sont empêtrés dans les contradictions de leurs reniements successifs.
Le succès du candidat LR montre ainsi que la politique de l’offre est toujours la meilleure, y compris dans le champ électoral ! La droite conservatrice n’a pas couru après la demande, elle a constitué une vision cohérente, une stratégie efficace pour gagner des parts de marché. Ce faisant, une ligne qui semblait encore minoritaire il y a 10 ans, s’impose progressivement.
Paradoxalement – et malheureusement, les libéraux n’ont pas su suivre la même voie. Il le faudra pourtant pour la droite si elle veut revenir aux affaires : sa réussite électorale s’est faite sur l’alliance du libéralisme et du conservatisme.
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