Voici le texte de ma chronique : Comment la dépense sociale empêche notre système de santé de se projeter dans l’avenir
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Dans un pays comme la France, où le système de santé est perçu comme devant être nécessairement au cœur de la solidarité nationale, il est envisageable que des consultations d’exceptions soient financées collectivement. Mais pour se le permettre, encore faut-il que la sécurité sociale soit efficace. Décryptage comme chaque semaine dans la chronique du « buzz du biz ».
Le secteur de la santé est en train de vivre une révolution silencieuse, mais tous azimuts. En France, en Europe et ailleurs dans le monde, la médecine traverse de considérables mutations : d’une certaine façon, elles mettent en évidence les dysfonctionnements de notre sécurité sociale qui devra s’adapter pour perdurer.
Dans l’économie contemporaine, la santé est un formidable terrain et terreau d’innovations.
En 2000, Bill Clinton et Tony Blair annonçaient pleins de fierté le premier séquençage d’un génome humain. Durée : 15 ans. Coût : 2,7 milliards de dollars. Aujourd’hui, la même opération se fait en 24 heures et coûte environ 1000 dollars. Ce « séquençage low cost » est une révolution qui pourrait bouleverser l’activité du dépistage et de la prévention (comme ici, en 2012, quand un laboratoire d’Atlanta a permis de venir à bout d’un microbe mortel à Denver).
Ce n’est qu’une partie de l’iceberg ! Demain, il sera possible de repérer les maladies et de les soigner très en amont, grâce à une connaissance toujours plus précise du corps et de son fonctionnement. Dans sa dernière livraison, la MIT Technology Review liste 10 « technologies révolutionnaires » (breakthrough technologies) : parmi elles, la cartographie du cerveau (brain mapping) et l’édition de génome (genome editing). La première poursuit et accélère la connaissance fine de cet organe si mystérieux. La seconde, qui permet d’induire des mutations génétiques, devrait ouvrir la voie à de nouvelles initiatives et techniques pour soigner. Les diagnostics non invasifs et précoces se développent également à grande vitesse : Google ne s’y trompe pas et a investi dans un test de dépistage de l’autisme par prélèvement sanguin.
Rien de tout cela n’est gratuit. Si le séquençage a un prix qui baisse, l’innovation médicale a, elle, un coût qui croît. En septembre 2013, la MIT Technology Review a consacré un fascinant dossier à cette problématique spécifique : parmi les papiers, un économiste relevait que les innovations rendent toujours plus coûteux le système de soins…
Au 21e siècle, le secteur de la santé est également bouleversé par les nouvelles technologies.
Si Skype permet à chacun de se sentir proche de ses amis expatriés, dans la médecine, l’abolition des distances permise par Internet est en train de modifier sérieusement la façon d’exercer. Non seulement les chirurgiens peuvent s’amuser avec les Google glasses, mais grâce aux robots et aux technologies de l’information, ils peuvent réaliser certaines interventions à distance.
Demain, les patients pourront avoir accès aux meilleurs médecins, à travers le monde, grâce à Internet. Les praticiens locaux resteront et continueront à exercer, mais l’accès aux « stars » sera plus ouvert, plus immédiat, plus (technologiquement) accessible. Financièrement, c’est une autre histoire…
A l’inverse, des services se développeront aussi à des prix plus abordables, comme HealthTap, qui permet de renseigner les internautes inquiets par des avis sérieux de médecins. Le tout encouragera certainement la transparence (comme cela se pratique à Oklahoma City) et favorisera la concurrence.
Dans le monde qui s’annonce, l’innovation continue et l’accès aux meilleurs praticiens seront un luxe coûteux. Dans certains Etats, seuls les plus riches pourront se le permettre. Dans un pays comme la France, où le système de santé est perçu comme devant être nécessairement au cœur de la solidarité nationale, il est envisageable que des consultations d’exceptions soient financées collectivement. Mais pour se le permettre, encore faut-il que la sécurité sociale soit efficace.
Or, avec une dépense sociale qui atteint des records (elle représente près de 47% de la dépense publique, soit 520 milliards d’euros), le système est déjà outrageusement cher. Régulièrement, les institutions d’évaluation rappellent la nécessité de réformes. Mais rien ne se passe. Cette inaction, coupable, risque bien d’empêcher notre système de santé de se projeter dans l’avenir…
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